RÉFLEXIONS SUR LA SEMAINE DE PRIÈRE POUR L’UNITÉ CHRÉTIENNE
Comment les temps, la culture, la bigoterie, les préjugés et l’animosité religieuse ont évolué au cours de ma vie… une réflexion personnelle.
J’ai grandi dans une famille solidement catholique, un mélange de deux périodes de persécution religieuse : l’émancipation catholique, la permission de pratiquer sa foi ouvertement n’est apparue qu’au milieu des années 1800 en Angleterre. En Irlande, on assistait davantage à une persécution économique des catholiques, issue d’une invasion britannique protestante qui les a chassés de leurs propriétés familiales pour les placer en état d’abjecte pauvreté.
La ville où j’ai grandi était solidement catholique, mais elle était aussi fortement protestante et anticatholique. Nous vivions dans une zone éloignée de notre église catholique locale et par conséquent, il y avait peu de familles catholiques dans notre quartier. C’est pourquoi quand j’étais jeune, mon choix d’amis, mis à part mes frères plus âgés, se faisait parmi des « non catholiques » et cela ne plaisait pas du tout à ma mère ! À deux ou trois portes de chez moi se trouvait le presbytère anglican local – une très grande maison disparaissant derrière des murs de pierre de huit pieds de haut et d’imposants peupliers de Lombardie. Il était strictement interdit de s’aventurer sur la propriété, qu’il s’agisse de récupérer une balle perdue ou chercher des nids d’oiseaux. Puis un jour, quand j’avais environ huit ans, un nouveau vicaire et sa famille prirent possession des lieux. Les enfants avaient à peu près notre âge et nous étions disposés à échanger avec eux les secrets du voisinage contre le mystère que leur maison abritait. À notre grande surprise, le vicaire approuva cette attitude de « bienvenue » envers ses enfants et il nous invita à prendre d’assaut un jardin envahi par la végétation, d’où surgit bientôt un court de tennis gazonné laissé à l’abandon. Ce terrain devint en peu de temps une Mecque de soccer pour certains des enfants locaux.
Une crise survint lorsque nous fûmes invités à la fête de Noël des enfants dans la grande salle anglicane. C’était une époque d’après-guerre très difficile et les friandises étaient rares. Notre mère demanda à notre curé de se prononcer. Nous avions la permission d’y aller à condition de ne prendre part à aucun acte du culte, comme par exemple le Bénédicité avant le repas ! Inutile de préciser que notre désir de participer à une fête comportant de la nourriture et des présents surpassait de loin tout préjudice de notre part. Cette occasion fut pour moi le début de l’ère de l’œcuménisme ou de l’unité chrétienne ! Je devais encore souvent recevoir des flèches dans mes roues de bicyclette quand je pédalais à travers les rues protestantes hostiles en me rendant à l’école ou à l’épicerie du quartier. Même si nous avions la même apparence, nous vêtions d’habits semblables, parlions le même dialecte, nous demeurions des « Catlicks » et eux restaient des « Proddy Dogs ».
À cette époque, il était considéré comme « péché mortel » d’assister à une célébration du culte dans une église protestante sans une permission spéciale du curé.
Soixante-dix ans plus tard, je peux vraiment dire : « Comment les temps, la culture, les préjugés et cie » ont changé. Aujourd’hui, mon épouse, une fervente anglicane, et moi-même, avons assisté à un service de prière pour l’unité chrétienne à la cathédrale catholique St. Andrew, à Victoria, conduit par notre propre évêque Gary Gordon et son homologue anglican, l’évêque Logan. Le thème du service était la « réconciliation » en préparation du 500e anniversaire de la Réforme en Europe. Ils nous ont invités à célébrer la grâce réconciliatrice de Dieu, reconnaissant la douleur et les divisions profondes qui affectent l’Église chrétienne à ce jour, et à devenir des ambassadeurs du message de réconciliation du Christ.
En tant que vincentiens, nous sommes bien placés pour mener tous ceux que nous servons à travers notre ministère de bienveillance compatissante, qu’ils soient chrétiens, agnostiques ou athées. Nous les canadiens sommes actuellement appelés à vivre un temps de réconciliation avec les Premières nations de notre grand pays, dont plusieurs ont été arrachés à leurs foyers et éduqués par des femmes et des hommes chrétiens dans des circonstances qui ont eu de lourdes conséquences. Le christianisme leur a été imposé, sans égard pour leurs manières traditionnelles de révérer le créateur.
Au paragraphe 1.4.1.1 de la Règle de notre Société, il est stipulé que « Toute personne de bonne volonté, désireuse de vivre sa foi en aimant et en servant les pauvres, de participer aux réunions et aux activités de la Société, (…) peut devenir un membre à part entière de la Société de Saint-Vincent de Paul du Canada. »
Mon épouse anglicane est membre de notre conférence locale depuis près de 15 ans et elle a activement et pleinement participé au travail de la Société, y compris les réunions locales, régionales et nationales. J’encourage les conférences à favoriser le mouvement de l’unité chrétienne tant dans son ministère que parmi ses membres.
Joe Rigby, membre du comité de spiritualité