Un logement sain, sécuritaire et abordable est un droit fondamental
Les Autochtones et la pauvreté au Canada
Certes, la pauvreté au Canada et ailleurs touche des gens de toutes les races, ethnies et tranches d’âge, mais les données révèlent qu’elle afflige davantage les groupes racisés.
Dans ce bulletin, j’illustre l’impact de la pauvreté sur les Autochtones du Canada. Les statistiques proviennent surtout du recensement canadien de 2016, et je les divise ici en six catégories :
- Éducation et apprentissage
- Bien-être juvénile et santé
- Revenu et assistance sociale
- Justice et police
- Logement et sans-abrisme
- Sécurité alimentaire et hydrique
Éducation et apprentissage
En 2011, 27% des membres des Premières Nations de 25 à 64 ans, 17% des Métis et 27% des Inuits n’avaient ni grade, ni diplôme, ni certificat, par comparaison à 11% des non-Autochtones. Un quart des femmes métisses et 38% des femmes inuites attribuaient l’abandon de leurs études secondaires à la grossesse et aux obligations parentales. Onze pour cent des Autochtones du Canada comptaient un grade universitaire contre 29% chez les non-Autochtones. En 2017, 78,4% des Autochtones détenant une formation postsecondaire étaient employés, contre 86% des non-Autochtones.
Bien-être juvénile et santé
Les Autochtones présentent les pires bilans de santé de toute la population canadienne. Par exemple, les troubles suivants frappent davantage les femmes autochtones : hypertension, maladie cardiaque, diabète, cancer du col et de la vésicule biliaire, V.I.H./SIDA, toxicomanie, maladie mentale, suicide. De plus, les disputes quant aux responsabilités fédérales-provinciales privent les jeunes Autochtones de fonds pour les soins de santé, et leur taux de suicide dépasse jusqu’à sept fois celui des non-Autochtones.
Selon la recherche, divers facteurs nuisent à la santé des Autochtones, dont le stress engendré par l’iniquité économique et scolaire, les mauvais logements, l’insécurité alimentaire, le manque de ressources sociales et la méfiance à l’égard du système de santé.
Revenu et assistance sociale
Selon le recensement de 2016, l’écart de revenu entre les Autochtones et non-Autochtones atteignait en moyenne 33% en 2012; de plus, 33,6% des membres des Premières Nations vivant dans une réserve touchaient de l’assistance sociale, par comparaison à 5% de la population non autochtone. Dans certaines communautés autochtones, plus de 80% des résidents vivent de l’assistance sociale, leur niveau de revenu étant lié à leur éducation.
Justice et police
Un rapport de 2014 de la GRC déclarait qu’il y avait près de 1200 femmes et filles autochtones disparues ou assassinées au Canada entre 1980 et 2012; pourtant, des regroupements féminins autochtones estiment qu’il y en avait plutôt plus de 4000. De plus, les femmes autochtones de 15 ans et plus avaient 3,5 fois plus de risque de se faire violenter que les femmes non autochtones, selon l’Enquête sociale générale de 2004. En 2016, cinq fois plus de femmes autochtones que de non-Autochtones ont été victimes d’homicide.
Selon la GRC, 92% des victimes du trafic de personnes au Canada font l’objet d’exploitation sexuelle, bon nombre d’elles étant de jeunes femmes autochtones.
En 2016, 25% des prisonniers fédéraux et 35% des prisonnières fédérales étaient autochtones; pourtant, ce groupe ne représente que 4,3% de la population. Entre 2005 et 2015, le nombre d’Autochtones en prison a augmenté de plus de 50%, et le nombre de femmes autochtones emprisonnées a presque doublé.
Logement et sans-abrisme
En 2011, une évaluation fédérale du logement autochtone confirmait que des rénovations importantes s’imposaient dans 41,5% des habitations des réserves, contre seulement 7% des habitations non autochtones. Moisissure, infestations d’insectes, chauffage déficient, eau contaminée… et la liste continue. Un exemple : en 2016, le Toronto Star racontait que pour sa population d’environ 2300, la Première Nation Attawapiskat en Ontario n’avait que 340 habitations, dont certaines abritaient jusqu’à 13 personnes.
En milieu urbain, les Autochtones comptent parmi les groupes racisés vivant dans des logements inappropriés, catalyseur fréquent du sans-abrisme.
À preuve, dans un rapport de 2017, Canada sans pauvreté affirmait qu’entre 28% et 34% des usagers d’abris étaient autochtones.
Sécurité alimentaire et hydrique
Entre 2004 et 2014, 66% des Autochtones du Canada ont vécu au moins un avis d’eau contaminée. En 2018, 25 communautés autochtones de l’Ontario faisaient l’objet de 46 avis d’eau contaminée à long terme—insécurité qui peut miner la santé des populations autochtones sous son emprise.
Ce sommaire ne présente qu’un petit exemple du lien entre la pauvreté et le racisme systémique, et on constate des statistiques semblables chez d’autres groupes racisés au pays. Quoiqu’il soit erroné de dire que toute la pauvreté découle du racisme, le grand rôle qu’y joue ce fléau est indéniable.
Jim Paddon, président
Comité de justice sociale national